Deuxième épisode de notre exploration de ce grand corpus qu'est la Bible.
Sa rédaction s'est étalée dans le temps, influencée par le contexte historique, le style littéraire du moment... Ces textes se sont transmis fidèlement d'une génération à l'autre. Essayons d'en savoir un peu plus.
Pour voir le premier épisode cliquez ici.
Si j’ouvre ma bible, nous avons vu précédemment que je pouvais tomber sur pléthore de styles de textes différents. Comment faire pour savoir à quoi j’ai affaire ?
Une transmission très fidèle
Il faut d’abord savoir que la rédaction des livres bibliques s’est effectuée sur plus de 1500 ans, et par plusieurs dizaines d’auteurs différents.
Au départ, il s’agissait uniquement de récits oraux. La transmission s’effectuait de bouche à oreille. Le peuple hébreu disposait de techniques de mémorisation très efficaces. Le rythme des phrases et leurs compositions sémantiques favorisent l’apprentissage. Le corps n’est pas en reste, la récitation se faisant souvent debout en utilisant la kinesthésie pour mémoriser.
L’écrit est peu à peu venu compléter l’oral sans le remplacer, permettant de fixer et uniformiser les récits. Parfois plusieurs sources orales furent fusionnées, provoquant quelques redondances et contradictions apparentes.
Cette transmission s’est faite très fidèlement au fil des siècles. Ainsi, traditionnellement, lorsqu’un juif entreprend de recopier un texte de la bible, il n’admet aucune rature. En cas d’erreur le rouleau est jeté et il n’y a plus qu’à recommencer.
Cet attachement à une transmission fidèle peut s’expliquer en partie par les persécutions et déportations successives que le peuple juif à subi. Lorsque l’on a tout perdu matériellement, il ne reste que la Foi et un récit commun pour unir les gens.
À partir du règne du roi Josias, vers le 6ᵉ siècle avant J.-C., l’alphabétisation a donc énormément progressé. On estime qu’à l’époque de Jésus, la majorité de la population masculine savait lire : soit mieux qu’au 18ᵉ siècle en France.
Les femmes, elles, bien que souvent instruites en famille, ont dû attendre le développement du christianisme pour accéder pleinement à l’enseignement des textes religieux.
L’influence du contexte historique et littéraire
Tous les auteurs de ces nombreux textes ont chacun laissés leur patte, leur style personnel. Ce qui permet d’ailleurs à certains spécialistes d’identifier qui a pu écrire tel ou tel passage.
Le contexte historique a énormément influencé les récits. Par exemple, le livre du Lévitique, rassemble prescrivant les pratiques religieuses. Il a été mis en forme vers -500 à partir de sources plus ancienne. Cette époque correspond à une période de reconstruction du temple de Jérusalem. Après une période d’exil et de guerre, le contexte politique se calme et il faut de nouveau unifier le peuple et restaurer le culte. Or, le Lévitique insiste fortement sur l’importance du temple et le pouvoir du grand prêtre y officiant. Les lévites étant les religieux au service du culte.
Ce livre du Lévitique est donc un bon moyen de lever une campagne de fond.
La rédaction des textes peut aussi avoir été influencée par d’autres récits qui n’appartiennent pas à la Bible. Mais qui sont issues des mythologies des peuples voisins. Le récit de la création dans la genèse pourrait ainsi avoir quelques rapprochements avec celui des babyloniens.
Un autre point intéressant à retenir : les pseudépigraphes. Ce sont des récits faussement attribués à un grand personnage. Ce procédé traditionnel est couramment utilisés dans l’antiquité. Non pas pour tromper le lecteur et mieux vendre son bouquin, mais pour s’inscrire dans l’héritage spirituel et intellectuel dudit personnage.
Ainsi, dans le dernier chapitre du Pentateuque, Moïse n’a certainement pas pu raconter sa propre mort. De même, si le roi David a probablement écrit beaucoup de Psaume, il n’est pas l’auteur de tous ceux dont il en est réputé.
Pour conclure ces explications, je voudrais attirer votre attention sur l’utilisation importante des symboles. En hébreu ancien, chaque lettre et nombre possède un sens symbolique, auquel les auteurs (et lecteurs) accordent plus ou moins d’importance.
Le nombre 40 revient ainsi très souvent : les 40 ans du peuple juif dans le désert, les 40 ans du règne du roi David, les 40 jours de Moïse sur le mont Sinaï, les 40 jours après Pâques… Ce nombre symbolise le temps nécessaire pour préparer un changement, c’est le temps de maturation des cœurs. Cette symbolique est d’ailleurs reprise dans le calendrier chrétien : les temps de l’Avent et du Carême durent 40 jours.
J’espère ne pas vous avoir noyé sous les explications pour cette fois. Lors du prochain épisode, nous essaierons de remettre les livres bibliques dans l’ordre pour comprendre la chronologie biblique. Un gros morceau !
Sources : Expositions bnf; Après la Démocratie (Emmanuel Todd ); http://www.eecho.fr/; La bible en toute simplicité (Nick Page); Pour une foi réfléchie (Alain Nisus)