À la sortie d'une bouche de métro, ce soir-là quelqu'un capte mon regard et me souris. Banal ? Pas vraiment, plutôt rare même. Remémorer vous votre journée, votre semaine. Combien de fois avez-vous regardé en face la personne que vous croisiez sur le trottoir, dans l’ascenseur... Et combien d'autres avez-vous regardé vos pieds ou ce SMS si important sur votre téléphone ? Ou même, prenez-vous le temps de regarder la personne à qui vous donnez la paix du Christ à la messe, en pensant vraiment aux mots que vous prononcez ?
Et plus la ville est grande, plus la densité est importante, moins l'on fait attention à ses voisins. Il y a certes des raisons physiologiques et psychologiques à cela. L'évolution n'a pas préparé l'être humain à vivre entassé avec plusieurs centaines de ses semblables par kilomètre carré et à gérer des rencontres aussi nombreuses. Chacun de nous a un espace autour de lui auquel seuls les intimes ont accès. Ceux qui regardent leurs chaussures ou les publicités dans le métro bondé trouvent inconsciemment un compromis avec le stress qu'engendre la pénétration de leurs espaces privés par des inconnus. En faisant abstraction des autres on se sent moins agressé.
Un autre phénomène qui entre en jeu peut être la peur des sollicitations. On suppose que si on regarde telle personne en train de récolter des sous pour une association croise notre regard on sera contraint de lui en remettre. Ou bien on se sent coupable de ne pas donner au SDF qui réclame de quoi se payer un repas et on préfère l'ignorer.
Et pourtant, est ce que la vie n'est pas plus ensoleillé quand les gens avec qui on prend l’ascenseur se saluent simplement au lieu de fixer leurs pieds ? Et savez-vous que le simple fait de sourire aide votre cerveau à voir la vie un peu plus en rose ?
En tant que chrétien, nous avons le devoir de transmettre l'amour de Dieu au monde. Si certains sont appelés à de grandes œuvres, chacun peut agir au quotidien. Chaque personne que vous croisez est, elle aussi, fille/fils de Dieu. C'est pas banal ! Quand vous aurez du mal à retenir votre mauvaise humeur en rentrant du boulot et insulter silencieusement vos voisins de siège dans le métro essayez de vous rappeler que vous ne croisez que des princes et princesses divins :-)
Regarder quelqu'un c'est lui donner une existence, lui montrer que vous le reconnaissez comme faisant partie de la famille humaine. Un SDF mendiant sur le trottoir, doit endurer le froid, l'inconfort de la position, la faim, des stress de vie énormes... et si en plus il se voit ignoré dans sa détresse, c'est bien pire. Il ne s'agit pas alors de distribuer tout votre argent aux indigents rencontrés (vous pouvez aussi bien sûr, mais ce n'est pas demandé à tous ^^). Par contre, vous pouvez tout simplement prendre le temps en lui donnant votre aumône de regarder votre frère/votre sœur avec bienveillance, prier brièvement pour lui dans votre cœur, lui sourire peut-être, ou même pourquoi pas échanger quelques mots si vous vous en sentez capable (un simple « bonjour monsieur » peut suffire).
Ne croyez-vous pas qu'un « Au-revoir, bonne journée » prononcé avec sincérité et chaleur à la caissière de votre supermarché n'illuminera pas la journée de celle-ci ?
Si on vous sollicite financièrement pour la 20ᵉ fois de la journée, vous avez le droit de refuser sans chercher de fausses excuses « Je respecte votre engagement, mais non merci, je ne veux pas donner à votre association. C'est mon choix et je n'ai pas à vous en donner les raisons. Passez une bonne journée. » C'est bien plus agréable pour chacun et votre interlocuteur se sentira respecté malgré votre refus, bien plus que si vous dites faussement que vous êtes pressés, n'avez pas de RIB ou autre argument entendu mille fois par jour par le bénévole.
Regarder l'autre, celui que je croise quotidiennement ou à une seule occasion, est un cadeau que je lui fais. Je lui offre d'être lui-même/elle-même avec toute sa complexité que je ne connais pas, mais que je sais exister. Mon interlocuteur n'est pas un simple moyen d’obtenir telle information ou service, il est une personne digne d'être aimée de Dieu.
Soyons des porteurs du regard aimant du Père pour le monde !